Mathias est en colère, en colère après lui-même, en colère de tout son être. Il apprécie de moins en moins l’image qu’il voit et ressent de lui, et les faits en attestent, il ne réussit en rien : études, ami, amour, sport…

Depuis son entrée au collège il a instauré un rituel auquel il ne déroge sous aucun prétexte : tous les lundis il déjeune chez sa grand-mère. Et c’est dans cet état d’esprit qu’il pousse la grille du jardin de mamie.

Elle, tout sourire, l’attend sur le pas de porte. Elle guettait sa venue avec l’impatience du bonheur. Mathias est son seul petit-fils, et chaque jour elle pense que c’est le plus beau cadeau que sa fille lui a donné.

  • Alors comment vas-tu mon ange ?
  • Ça va mamie, ça va.
  • Hum ! tu n’es pas très convaincant Mathias, as-tu un souci ?

Il serre sa grand-mère contre lui sans un mot et l’embrasse dans le cou. Elle a toujours un petit rire quand il fait ça, on dirait une jeune fille.

  • Que m’as-tu préparé de bon ce midi ma petite mamie chérie, j’ai très faim !

Le déjeuner se déroule, comme toujours, dans le plaisir simple des liens profonds de connivence qui les unissent.
Au café, la grand-mère prend la main de son petit-fils.

  • Alors maintenant raconte-moi ce qui se passe ?
  • Je crois que je vais arrêter le collège, je suis nul et mauvais en tout !
  • Comment ça ? Dis-moi plutôt ce dont tu as besoin pour changer cette opinion de toi ?
  • Je ne sais pas mamie, c’est trop dur, j’y arrive pas…
  • Mathias, il y a toujours possibilité de s’améliorer, certes cela demande du temps et des efforts, mais tu peux y arriver si tu saisis les opportunités qui se présentent à toi.
  • Mamie je t’assure je suis incapable de réussir un contrôle de maths et je fais des tas de fautes à l’écrit.
  • Les études demandent un entraînement du cerveau, il y a plein de jeux et d’exercices pour cela.

La grand-mère regarde son petit-fils. Lui, n’ose pas lever les yeux mais lui caresse doucement sa main ridée. Elle voudrait tant lui dire la confiance qu’elle a en lui.

  • Tu sais Mathias, les erreurs permettent d’apprendre et de progresser. Tu as le droit et même le devoir de te tromper, et de prendre le temps d’apprendre de tes échecs.
  • Les autres sont tellement plus intelligents et rapides que moi, ça me désespère…
  • Tu crois vraiment ça ? Alors dis-moi mon petit, comment ils font, les autres, pour réussir ? Qu’ont-ils de plus que toi ? Que dois-tu faire pour être comme eux ?
  • Je fais beaucoup d’efforts mamie ! ça suffit ! j’en ai assez !
  • Ah oui ? Fais-tu vraiment du mieux que tu peux ? Est-ce qu’il n’y a pas des choses à mettre en place pour te permettre de donner encore un peu plus d’efforts ?

Mathias se lève, il est triste et en même temps il ressent combien sa grand-mère croit en lui et cela le touche profondément.

  • Tu sais comme moi, Mathias, dans l’alphabet il y a 25 autres lettres après le « A », et si maintenant on passait au plan « B » ?
  • Je n’y arriverai jamais tout seul mamie !
  • J’entends ce que tu me dis, alors voyons ensemble les ressources qui pourraient t’aider ?
  • Ah ! ma mamie, tu as réponse à tout et tu trouveras toujours une solution pour déplacer une montagne !

Ils rient tous deux de bon cœur et Mathias va mieux.

  • Mathias, l’intelligence a plusieurs formes et si tu le veux vraiment, tu découvriras comme tu es intelligent.
  • C’est si difficile mamie, je n’y arrive pas.
  • Non, non mon petit, dis-moi plutôt « je n’y arrive pas encore » et là je suis d’accord. Tu dois avoir une meilleure estime de toi, là est la clé de la confiance, de la persévérance et de la réussite.

Il prend sa grand-mère dans les bras et lui dit : Ma mamie tu es trop belle ! Ton amour, tes mots me donnent du courage. C’est promis, chaque fois que je perdrai confiance en moi, je penserai à toi. A lundi prochain ma p’tite mamie !

Aujourd’hui, Mathias a compris qu’il fallait sortir de sa zone de confort, avoir l’audace et la motivation à la hauteur de ses ambitions, de ses défis, explorer tous les possibles, apprendre de ses échecs pour repartir plus fort et plus motivé encore. Il a appris ce qu’était la confiance en soi. Qu’elle s’appuie sur une acceptation de soi, une réconciliation avec soi, un amour de soi en tant qu’être digne, respectable, et valeureux. Ça fait beaucoup en un seul jour, mais ça vaut le coup !

L.N