Les chaussettes blanches

Les faits remontent aux années 60. Dédou n’avait que 7 ans et voulait toujours suivre sa sœur « ainée » qui avait à peine 3 ans de plus qu’elle. Et ce qui devait arriver arriva :

– Maman, maman j’ai taché mes chaussettes blanches ! s’était-elle écriée en pleurant.

– Mais que s’est-il passé ? s’était inquiétée sa mère. Qu’est-ce que tu as fait, tu as le visage tout en sang !

Elle n’avait pas attendu la réponse de sa petite fille, et s’était immédiatement tournée vers la sœur ainée, qui était encore très jeune :

– Je t’ai confié ta sœur, tu devais la surveiller !

A proximité de leur lieu de résidence, un chantier était en cours et il était formellement interdit d’y pénétrer. D’ailleurs on pouvait clairement lire sur une pancarte « Chantier interdit au public ». Mais c’était trop tentant d’aller voir ce qui s’y passait…Alors, lorsque les « grands » s’étaient faufilés de l’autre côté du grillage, Dédou avait aussi voulu satisfaire sa curiosité.

Ce n’était pourtant pas un espace de jeux, il y avait une grue, du ciment, des parpaings, des barres en fer…, toute sorte de matériaux pour la construction d’un nouvel immeuble. Mais pouvoir jouer à l’équilibriste sur une barre s’était offert à elle, et avant même que sa sœur n’ait eu le temps d’intervenir, patatras, Dédou s’était retrouvée parterre.

Des cris, des peurs, des pleurs… tout s’était emmêlé, sa vue s’était troublée, et elle avait mal à la tête. En quelques minutes elle avait vu sa sœur s’affoler, et le sang couler sur ses chaussettes blanches.

  • Que va dire maman, je me suis salie ! avait dit Dédou en pleurant alors que sa sœur savait à l’avance qu’elle aurait à se justifier devant leur mère.

Et pourtant elle n’était pas responsable, ce serait injuste d’être grondée à cause de cette petite sœur qui ne lui lâchait jamais les baskets avait-elle pensé. Certes, ils avaient tous désobéis en passant outre à l’interdiction mais ce n’était quand même pas de sa faute si Dédou était tombée, elle ne l’avait pas entraînée, elle ne l’avait pas poussée non plus.

Mais dans l’heure, il fallait faire vite et rentrer à la maison afin que leur maman puisse soigner la plaie qui saignait sur le front de Dédou.

La plaie était trop profonde, alors leur maman avait pris la décision d’emmener Dédou chez le médecin.

– Quelques points de suture et dans quelques jours tout rentrera dans l’ordre, lui avait-il dit. Tu as été très courageuse Dédou, mais tu dois promettre à ta maman qu’à partir de ce jour tu ne lui désobéiras plus et que tu seras bien sage ! avait-il ajouté.

L’histoire se termine avec une belle cicatrice sur l’arcade sourcilière que Dédou gardera à jamais, mais ne précise pas si depuis ce jour-là elle est devenue obéissante.

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