Depuis trois semaines, je vais, je viens, je fais de constants aller-retour dans l’espace qui m’est alloué. Je me colle à la vitre mais je ne vois personne ou presque. Je monte, je descends, je vais à droite, je vais à gauche. Je crois que je vais devenir fou. «Je suis fou de vous ouh ouh … ou fou du chocolat Lanvin » hum ! Pas de quoi prendre un fou rire, mais plutôt un fou pleur. Oui, je suis fou de rage. Oh ! J’entends un bruit, vite approchons-nous de la vitre. Une petite fille ! Qu’elle est mignonne ! Mais ? Que fait-elle ? Elle me fait des grimaces puis s’enfuit en courant. Est-ce que je fais si peur que cela derrière ma vitre ? Je reprends tristement mes aller et venues. C’est l’heure du repas. On me livre à domicile, mais attention…ne pas toucher la main qui donne, respecter le sans-contact. Paiement sans contact, vie sans contact, vive les relations humaines. Je vais me ressourcer un peu dans le lieu que j’ai baptisé « impasse de l’Espérance » ou devrais-je dire « un spasme d’Espérance ». C’est un petit espace avec quelques plantes, juste ce qu’il faut pour faire semblant de croire que je suis en pleine nature. La nature, j’en rêve ! Mais ma mémoire me permettra-t-elle de me remémorer les odeurs, les couleurs, la douceur de la nature en restant ici encore longtemps ? Je me colle à nouveau à la vitre. Je vois quelqu’un passer, mais il m’ignore. Indifférence ou peur de l’autre ? Le silence est là, lourd et pesant. Je me précipite dans mon impasse, comme un enfant cherchant les bras protecteurs de sa mère, et là je me mets à chanter doucement : « Mon bocal est trop petit, l’eau est sale, l’herbe y pousse, je veux voir du pays et m’étendre… sur la mousse eu. »
Vous qui vivez le confinement, vous comprenez enfin ce que vivent les poissons rouges comme moi. Alors… Libérez-moi !!!

Le poisson rouge

Ps : Sachez que petit poisson veut devenir grand…. mais pas dans un bocal !