Impasse de l’Espérance

Ca y est, je me souviens… je revois le panneau en lettres blanches sur fond bleu : « Impasse de l’Espérance ». Je tournais en voiture depuis une heure dans ces quartiers populaires de Mulhouse… j’ai dû passer à côté au moins trois fois. Mais ça y est : le poteau de la pancarte de rue est d’ailleurs décoré avec des ballons de couleurs vives. C’est bien là, et c’est déjà la fête. Ah oui, pour ça c’était une belle fête…

Mais qu’est-ce que c’est que ce tuyau dans ma gorge ? Et pourquoi suis-je couché sur le ventre ? Ah, bon sang, je suis dans le cirage ! Qu’est-ce qu’il m’arrive ? Et ces bips au dessus de ma tête. Je n’arrive pas à ouvrir les yeux… 

Ah ! Je revois la fête, c’était trop beau. Cinq grandes journées à communier dans la ferveur. Et tous ces chants, ces accolades, ces heures passées main dans la main à chanter et à prier le Seigneur ! Comme c’était beau. Et le pasteur qui levait les bras au ciel et qui nous criait « Mes frères… » et qui nous redonnait cette espérance si dure à conserver dans notre monde d’aujourd’hui… Je me souviens de cette belle blonde qui venait de Perpignan, lorsque nous avons tous repris en chœur « Plus près de Toi mon Dieu… » et qui se tourna vers moi pour me dire avec son accent chantant « Eh, on se croirait sur le Titanic… » Comme elle riait bien en serrant plus fort ma main ! Et lorsque nous nous sommes quittés, tous les trois mille, après plus de quatre jours de communion, ceux qui venaient de Paris, comme moi, et ceux qui venaient d’Allemagne, de Suisse toute proche, de Corse, de Guyane, de tous les coins de la Terre pour ramener chez eux cette espérance que nous étions venus chercher là, à Mulhouse, en ce mois de février… 

Ah ! J’ai du mal à respirer, si je pouvais parler, si je…

« Monsieur ! Monsieur ! Vous m’entendez ? Serrez ma main si vous m’entendez ! »

Mais oui je vous… qui ?… Qui êtes-vous ?

« Docteur ! Docteur ! on dirait qu’il va se réveiller ! »

« Bon sang, Mallorie, l’oxygène, regardez ! il n’en prend presque plus ! »

« Docteur, il faut augmenter le débit, il faut… »

« Inutile, Mallorie, il est déjà au débit maximum… »

« Adrénaline, docteur ? »

« Non, Mallorie, c’est inutile. On le perd …On le perd… hélas… Un de plus… »

Je… Je me souviens… Impasse de l’Espérance… Comme c’était beau, cette f…